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17 juin 2015 3 17 /06 /juin /2015 12:10

Le Parlement se réunira en session extraordinaire en juillet pour examiner, parmi d’autres, le projet de loi NOTRe (Nouvelle Organisation du Territoire de la République).

Pourquoi une session « extraordinaire » ? Pas parce que le contenu de ce texte nécessite un formalisme particulier, mais tout simplement parce que pendant le Parlement vote des amendements sur la publicité du vin et donne une image déplorable de lui-même lors des débats de chiffonniers retransmis ou par son absentéisme chronique en session ordinaire, les textes fondamentaux concernant notre organisation territoriale seront votés pendant que les français seront en vacances. Bronzez en paix !

C’est ainsi, la période estivale est propice à tous les coups en douce. En ce qui concerne ce projet, son enterrement programmé est le formidable révélateur de l’existence d’une caste politique crasse davantage préoccupée par ses intérêts particuliers que par l’intérêt général.

Un projet vidé de son contenu

Nous payons pour le savoir, il y a un gouffre entre les promesses électorales et les déclarations guerrières et la réalité, à tel point qu’on se dit qu’il ne vaudrait mieux pas essayer de réformer nos collectivités. Entre la suppression de la réforme Sarkozy (le conseiller territorial), les déclarations sur l’inutilité du Conseil Général, la réforme de l’intercommunalité, la nouvelle répartition des compétences entre les collectivités restantes, que reste-t-il dans ce projet ?

Rien ou si peu. Le Sénat s’est évertué à détricoter ce qui était susceptible de toucher à son pré carré (la diminution éventuelle du nombre de communes ou leur absorption au sein de grosses intercommunalités), ce qui était susceptible de diminuer prérogatives des conseils départementaux, même si cela coûte très cher aux contribuables locaux et tout ce qui touchait au renforcement des compétences des Régions, sans oublier de différer la mise en place du Grand Paris (pour des raisons de basse politique, essentiellement).

La bêtise crasse des élus et des partis

Jusqu’à preuve du contraire, un élu considère qu’il a surtout vocation à être réélu et par conséquent à faire carrière dans la politique, avec si possible des possibilités de promotion entre les différentes assemblées de la République.

Pour cela, il faut une organisation qui le permette et quoi de mieux que de multiplier les structures et surtout ne jamais accepter qu’on en supprime une. De la commune à l’intercommunalité en passant par les syndicats divers et variés, les conseils départementaux et régionaux, l’Assemblée Nationale pour les privilégiés et le Sénat comme stage de préparation à la retraite, tout doit être conservé pour favoriser un système qui favorise avant tout la classe politique et les partis plutôt que le citoyen et la bonne administration des affaires locales et nationales.

Conséquences tragiques pour la démocratie

Le gouvernement actuel (mais ce sera pareil pour les suivants) en quête d’économies budgétaires restreint ses dotations aux collectivités locales. Ceux qui votent ces mesures, au travers des lois de finances lorsqu’ils sont au Parlement gueulent et manifestent lorsqu’ils exercent leur cumul de mandat dans une commune, un conseil départemental ou régional et ce serait pareil avec une autre majorité. On entretient une rivalité fictive entre « Paris » et « les territoires », cela occupe les médias, nourrit une vie politique et démocratique tragique et surtout évite au citoyen de penser par lui-même. Mieux, le citoyen est lui-même instrumentalisé par ces discours schizophréniques d’élus en mal de réélection.

Cela nous donne de belles envolées et de belles images dans la presse : du crêpe de deuil sur le panneau de la commune aux déclarations définitives des maires ruraux («l’heure est grave ! »), en passant pas une guillotine installée par des élus en colère, les conseils départementaux qui nous disent ne plus pouvoir payer le RSA et les régions qui déclarent « ce n’est pas tolérable ! » en passant par les déclarations de l’Assemblée des Maires de France qui tend la sébile auprès du gouvernement, le barnum médiatique des collectivités est en marche et ses acteurs hypocrites se chauffent la voix, avant sans doute aller symboliquement, la corde au cou et en chemises déposer les clés de leurs collectivités à la porte de l’Elysée.

Les citoyens ballotés

Peu avertis des enjeux et des manœuvres qui se trament dans son dos, le citoyen assiste, incrédule, à ce grand cirque médiatique et ses excès ainsi qu’aux « mesures » prises par les élus locaux pour pallier le tarissement des ressources budgétaires en provenance de l’Etat. En ce moment, ce qui marche bien, ce sont les annulations des festivités et des feux d’artifice pour le 14 juillet ou bien la suppression des festivals.

Pour des élus pour lesquels la culture se réduit à « l’œuvre d’art » implantée sur le rond-point à l’entrée de la commune, le choix est vite fait entre la subvention à l’association culturelle facile à sucrer et celle à l’association des anciens combattants à laquelle on ne touche pas de même que celle du club de foot ou celle du troisième âge, même si certains bénéficiaires n’en n’ont pas besoin.

Etre élu, c’est investir, qu’on se le dise ! Il faut du goudron, des pavés en granit, des jardinières en bois, des lampadaires en veux-tu en voilà, la salle de sport ou la salle polyvalente aux dernières normes mais sous utilisée, et l’endettement qui va avec, et des relais d’opinion permanents que sont les associations locales, de préférence sportives, que l’on arrose avec le message suivant : votez pour moi la prochaine fois !

Depuis la décentralisation de 1982 et les pouvoirs qu’elle a conférés aux collectivités territoriales, on a créé une bulle qui est en train d’exploser. Les élus se sont emparés de leurs nouvelles prérogatives et ont investi au début, pour remettre les équipements à niveau, ce qui n’a pas eu que des inconvénients lorsqu’on se rappelle la décrépitude des collèges et lycées transférés aux départements et régions. Cet essor de l’investissement aurait pu retomber à un niveau normal, mais désormais les élus, voulant toujours bien faire pour se faire réélire et surtout les entreprises et fournisseurs divers de ces collectivités se sont bien habitués au système et à bien vivre sur l’argent du contribuable local, peu regardant sur les dépenses en période de croissance économique.

Ce n’est plus le cas aujourd’hui, et il va falloir penser à réformer les politiques locales d’investissement pour aller vers les politiques destinées à promouvoir la vie citoyenne et le vivre ensemble : cela va du développement de l’offre des hébergements pour les personnes âgées à la multiplication des modes de garde et d’accueil de la petite et moyenne enfance, sans oublier la culture et le sport dans toute leur diversité.

Autrement dit, une révolution culturelle que nos élus ne sont pas du tout prêts à faire. Il faudra que les citoyens comprennent les enjeux de ce qui est en train de se passer, décodent les comportements et les dénoncent et obligent les décideurs à se réformer eux-mêmes avant de réformer notre quotidien.

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