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17 janvier 2020 5 17 /01 /janvier /2020 21:29

Ça branle dans le manche depuis que le Président et son Ministre de l’intérieur se sont permis de faire remarquer aux forces de l’ordre, et particulièrement aux policiers, quelques règles déontologiques. Les syndicats policiers montent aux créneaux.

C’est l’histoire de la poule et de l’œuf : qui est à l’origine ?

Un pouvoir aux abois

C’est ce qui nous a été donné de voir au début du mouvement des gilets jaunes : des Ministres à la rue, incapable d’analyser le mouvement et le méprisant, comme il le fait actuellement pour le mouvement autour de la réforme des retraites. Tous les superlatifs ont été employés pour qualifier les manifestants d’alors, d’irresponsables, de violents appartenant à l’extrême droite ou à l’extrême gauche en passant par factieux ou bien encore d’ultra gauche.

Au lieu d’essayer de comprendre ce qui se passait, l’exécutif, avec sa communication désastreuse a jeté le discrédit sur le mouvement et a joué (comme il le fait aujourd’hui) la carte du pourrissement, avant de battre en retraite le 10 décembre, mais le mal était fait.

Comme d’habitude, aucun regard critique sur l’action gouvernementale, sur son tropisme pour les métropoles et son mépris pour le pays profond que l’on croit acheter à coups de milliards, mais la recherche d’un coupable, d’un fusible : c’est ce qui s’est passé avec le Préfet Delpuech qui incarnait une certaine forme du maintien de l’ordre et qui avait sans doute analysé que son travail ne pouvait pas s’effectuer correctement en présence d’une politique ouvertement « pro business » et méprisante pour « ceux qui ne sont rien ». La théorie du « camp contre camp » si élégamment déclinée quelques temps après par nouveau Préfet, droit dans ses bottes, s’est accompagnée d’une montée en puissance de l’outil sécuritaire et de ses inévitables dérapages.

Que s’est-il passé ?

Avec la complicité des médias et de leurs « spécialistes police-justice », on a d’abord joué la partition de la critique et de l’indignation face à un mouvement inédit qui n’avait pas de représentants et qui se refusait à déclarer ses manifestations en Préfecture. La tentation d’amalgamer et de trouver des connexions entre ce mouvement et d’autres, plus extrêmes comme le black block a été vite franchie et a servi de prétexte à une répression de plus en plus violente où l’on pouvait avoir parfois l’impression d’une forme de revanche de la part des policiers malmenés lors de la première séquence. De là, datent les premières images de dérapages des forces de l’ordre et plus particulièrement de la part de la police, la gendarmerie, mieux formée et plus respectueuse de la déontologie n’ayant que très rarement franchi les bornes.

Au pays des borgnes, l’aveugle était roi, puisque malgré un nombre exceptionnel d’arrestations préventives illégales, de blessures dues aux LBD, aux grenades diverses et variées, les nasses dans lesquelles on enfermait des manifestants avant de les gazer pour arriver ensuite par exemple à l’épisode de « l’attaque sauvage de la Pitié Salpêtrière », la hiérarchie policière et les Ministres qui ne pouvaient qu’être complices et «en soutien » ont été constamment dans le déni des violences policières.

Comment pouvait-il en être autrement ?

Les dispositifs policiers mis en place avec tout un cérémonial sécuritaire comme la police à cheval ou bien les véhicules blindés ont vite trouvé leurs limites et on a concocté à la va vite une forme de voltigeurs à moto comme au temps de Pasqua en frôlant parfois la catastrophe comme lors d’une intervention ou un motard en difficulté avait sorti son arme de service contre les manifestants. L’épisode, coupé au montage par une chaîne d’info à la recherche du sensationnel, remis dans son contexte avait mis en relief la dangerosité de ce type d’intervention risquée et délégitimé les médias, qui, rappelons-le, sont quasiment tous aux mains du pouvoir économique et réfutent toute remise en cause du pouvoir établi si propice aux affaires.

L’intégration au sein des forces classiques de maintien de l’ordre de policiers des BAC n’a pas amélioré les choses, compte tenu des techniques de « saute-dessus » et d’emploi de la force employées par ces brigades dans les quartiers sensibles. Ce mix de « doctrines » de maintien de l’ordre s’est traduit par une augmentation de violences policières de blessures et le début des arrestations musclées de manifestants et de vexations diverses et variées.

Cela a renforcé l’hypothèse d’une police à la dérive, soutenue du bout des lèvres par le pouvoir exécutif mais clairement légitimée par la nouvelle hiérarchie policière et contrôlée faiblement par l’IGPN.

Qu’est-ce qui a changé pour que le pouvoir exécutif hausse le ton ?

Tout d’abord une série de dérapages récents faisant suite à d’autres, dont celle de la fête de la musique à Nantes.

Le fameux croche pied est emblématique de ce lent glissement de certains membres de force de l’ordre se croyant tout permis, comme le tir d’une grenade dans un appartement à Lyon ou bien encore le matraquage gratuit et violent d’une manifestante qui ne cherchait qu’à récupérer son portable. Tout cela mis bout à bout vise à humilier, ce qui est pire, et ressemble à un énorme crachat sur le drapeau français.

Ensuite, le fait que la « doctrine du maintien de l’ordre » n’ait pas évoluée entre l’épisode des gilets jaunes et un conflit social, somme toute classique, contre la réforme des retraites. Nous avons pu voir que la technique de la nasse, celle de la dispersion avec grenades et matraquage de défilés syndicaux sous prétexte de la présence que quelques dizaines « d’extrémistes » avaient encore toute leur place comme au bon vieux temps des gilets jaunes. Il n’est pas exclu non plus que des éléments infiltrés dans les manifestations aient pu contribuer à renforcer la répression

Il est toujours facile de dire que les mouveements syndicaux se radicalisent pour justifier la répression. Il n’empêche qu’on pouvait faire l’économie de cette violence policière, d’autant qu’il s’agissait de revendications sociales classiques. On remarquera par ailleurs que les syndicats policiers n’hésitent jamais à monter au créneau (et bénéficient d’un traitement médiatique particulier) dès lors qu’un cas de bavure est signalé, en général pour le nier ou en demandant de le « re-contextualiser ». Le déni permanent ne peut pas être une stratégie face aux dossiers qui s’accumulent

Le paradoxe, c’est que les forces de l’ordre ont obtenu le maintien de leur régime spécial de retraites en réprimant des manifestants qui demandaient calmement la même chose qu’eux. Est-ce à dire qu’il faut montrer les dents et être violent pour obtenir gain de cause ?

Le laisser-faire dans certaines unités de police est tel que le port du RIO pourtant obligatoire, n’est plus effectif, ce qui peut apparaître pour le commun des mortels, à qui on interdit de se cacher le visage dans les manifestations, comme une facilité pour les dérapages.

Ne rien dire aurait été coupable

Cela aurait conforté la thèse que la violence policière était nécessaire pour faire passer les « réformes », que les droits de grève et de manifester font partie de « l’ancien monde » et que la stratégie consistait avant tout à dissuader les manifestants de manifester et à les discréditer.

Cela aurait pu faire croire que le pouvoir ne tient que par la police…

Cela aurait également créé le risque d’un amalgame désastreux entre un maintien de l’ordre violent, marginal mais très visible, et le travail de qualité et souvent sous tension que font les forces de police et de gendarmerie au quotidien pour la protection des biens et des personnes.

Reste à voir ce que cela va changer…

 

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