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8 janvier 2020 3 08 /01 /janvier /2020 11:51

Retraites à points, âge pivot, bonus, malus et tant d’autres détails qui cristallisent si bien le débat qu’on en arrive à ne plus rien comprendre de l’arnaque que constitue cette « réforme » qui enjambe la pénibilité, et l’égalité salariale hommes femmes, le tout emballé dans de la « justice sociale ».

Et si on s’extrayait de ce débat à deux balles, en prenant un peu de hauteur pour voir ce qui est en jeu réellement ?

Pourquoi cet emballement ?

Cela faisait bientôt deux ans que le Haut-Commissaire cumulard s’évertuait à endormir le bon peuple avec son projet et voilà que d’un coup, au détour d’un âge pivot qui n’est rien d’autre qu’un recul de l’âge de départ, on se rend compte de la nature réelle des failles, des « oublis » et des régressions de cette réforme, qui, sous couvert d’universalisme, se retrouve plombée d’un tas de nouveaux régimes spéciaux destinés à mettre le couvert sur la contestation qui faiblit à peine.

Après avoir joué le pourrissement du conflit et tenté de monter, avec un succès très relatif, grévistes contre non-grévistes, voilà désormais que le gouvernement entend boucler la négociation pour la fin du mois. C’est dire qu’il y a urgence, urgence à passer aux forceps une réforme d’inspiration très néolibérale et surtout le faire avant qu’une crise financière susceptible de mettre à mal les fonds de pension, ne vienne mettre en lumière les risques induits par le recours à la retraite par capitalisation qui, quoi qu’on en dise, fait partie de cette « réforme ».

Donc, c’est le néolibéralisme qui est à la manœuvre…

C’est quoi au fait le néolibéralisme ? Pour faire simple, on peut dire que c’est du libéralisme puissance 10. C’est la dénonciation constante du poids de l’Etat Providence (diminution des allocations chômage et « réforme des allocations familiales », par exemple. C’est aussi l’accroissement des interventions publiques dans l’économie (CICE, baisses de « charges »…). C’est la promotion de l’économie de marché et sa dérégulation (sachant que le « marché » est censé se réguler de lui-même…). C’est également la « liberté de l’individu » (qui a le « droit » de souscrire un fonds de pension parce qu’on prévoit de lui raboter sa retraite). C’est enfin la disparition des services publics au profit du privé qui se rémunère en général grassement sur le dos des contribuables ou des utilisateurs (autoroutes, Délégations de service publics pour les transports, l’eau ou bien encore partenariats publics privés très juteux), tout cela pour le plus grand profit des actionnaires du CAC 40 et autres entreprises, dont les fonds de pension, qui ne sont jamais bien loin.

C’est enfin, l’accumulation de toujours plus de richesses entre les mains de quelques-uns. Leur puissance leur permet de dicter leur loi, de se substituer aux gouvernements ou de les corrompre. Ils peuvent tout s’acheter, avec l’argent des impôts qu’ils ne payent pas. Ils décident au nom de cette doctrine mortifère de ce qui est bon pour eux, y compris en pillant les ressources naturelles.

Les lendemains qui chantent du néolibéralisme

Déjà, des choses concrètes ont été mises en place depuis deux ans (et aussi avant, par Hollande), comme la réforme du droit du travail qui multiplie les CDI, la loi PACTE qui fait le lit des fonds de pension en réorientant de fait l’épargne des français , la réforme des prud’hommes ou bien encore celle de l’indemnisation du chômage. Bientôt, celle des allocations familiales, en attendant sans doute une baisse des pensions versées actuellement au nom de la « solidarité intergénérationnelle ».

L’addition sera lourde

Paierons-nous moins d’impôt une fois que le dépouillement des services publics et de notre système social sera arrivé à son terme ? Non, parce qu’il faudra bien payer les nouveaux régimes spéciaux. Il nous faudra également payer les cadeaux faits aux entreprises (surtout à celles qui n’en n’ont pas besoin) sous forme de baisse de cotisations sociales et d’impôt sur les sociétés et toutes les exonérations de cotisations sociales et d’impôts pour les salariés sur les heures supplémentaires et les primes. Il nous faudra aussi payer les cadeaux fiscaux de la loi PACTE aux fonds de pension (1.5 Milliards prévus en 2020).

En s’appauvrissant pour mener à marche forcée sa politique néolibérale, le gouvernement Macron fait le choix du démantèlement des services publics, y compris dans des domaines stratégiques comme le développement durable. Nous paierons donc trois fois, la première pour payer auprès de délégataires privés l’accès à des services publics privatisés, la seconde pour payer la dette creusée par les cadeaux fiscaux et sociaux et le retour de régimes spéciaux, la troisième en souscrivant à un fonds de pension pour compléter nos retraites.

L’ordre nouveau

Au final, l’Etat ne gèrera plus que les missions régaliennes (sécurité, justice, prisons, forces armées,…) si indispensables pour protéger le  «nouvel ordre » (d’où les nouveaux régimes spéciaux…). Avec les nouvelles technologies de reconnaissance faciale, justifiées bien entendu par le besoin de sécurité, on arrivera à un contrôle social parfait capable de juguler la moindre contestation (comme en Chine).

Dormez en paix brave gens !

Si on devait résumer en utilisant des références cinématographiques, on pourrait dire : « Il y a ceux qui ont le révolver et ceux qui creusent » (Ennio Morricone), « Touche pas au grisbi, salope » et « Les cons osent tout, c’est à ça qu’on les reconnait » (Les tontons flingueurs).

Pour faire une bonne politique néolibérale, il faut des convaincus

Jusqu’alors, les choses se faisaient gentiment, dans la durée. L’accélération sans précédent des « réformes » montre que les gouvernants actuels ne sont pas venus là pour faire du tourisme, mais au contraire pour organiser une bonne fois pour toute la mutation de notre société. Composé de bric et de broc à l’origine, c’est-à-dire avec des politiques de l’ancien monde qui avaient un peu trop tendance à pratiquer le mélange des genres, il comprend aujourd’hui beaucoup de ministres au-dessus de tout cela en raison de leurs fortunes personnelles acquises dans des grands groupes commerciaux ou financiers.

Dès lors on est en droit de se poser la question de leur présence au gouvernement avec des salaires divisés par 5, 6 ou plus, sauf à penser qu’ils sont là en « mission » pour faire le lit du néolibéralisme sauce Davos ou Bildergerg. Nul doute que le commerce, l’industrie et la finance leur seront reconnaissants une fois le sale boulot fait et qu’ils pourront bénéficier de postes prestigieux et surtout bien rémunérés en récompense de leur activisme.

La question de la représentativité démocratique de nos dirigeants est posée dans la mesure où ils mettent en œuvre un agenda caché de réformes « indispensables » auquel les français n’adhèrent pas.

 

Il y a des signes qui ne trompent pas : les dividendes augmentent comme jamais et la Bourse s’envole. Comment interpréter ces signes autrement que par la confiance qui s’exprime envers les faire valoir du néolibéralisme qui nous dirigent et cherchent à nous endormir ?

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commentaires

A
Totalement d’accord avec vous. Je cite un extrait de votre article dans la contribution "La CFDT demandait depuis longtemps la généralisation d’un 3ème étage de retraite par capitalisation" que je viens de publier sur mon blog à http://www.retraites-enjeux-debats.org/spip.php?article1435 ... Comment faire éclater tout cela au grand jour ?
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J
Très bien vu, très bien dit !... mais un point une je n'ai pas compris : la multiplication des CDI
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